La bonne nouvelle, c’est que Verney Carron est sauvé, comme la presse aime à le dire. Ah bon ?
Verney Carron, cela parle surtout aux chasseurs. Je n’en suis pas. Mais mon beau père l’était. Et il était fier d’avoir pu acquérir un jour un de leurs fusils. C’est une entreprise leader dans son secteur, qui avait les capacités de faire rayonner la France au delà du bistrot PMU de Saint Etienne, dont l’industrie et le savoir faire ont été massacré. Je vous laisse chercher et vous renseigner, sans vous boucher le nez, car le sujet est vraiment passionnant et particulièrement instructif de comment on peut massacrer un secteur sans rien n’y connaitre et en ne faisant que des choix “politiques” qui se sont révélés de cruelles erreurs. C’est curieux d’ailleurs car je vois de nombreux parallèle avec mon secteur (“high tech” pour le dire vite) et c’est aussi pour cela que j’ai eu envie d’en parler.
Je devrais me réjouir, mais non. Je crains pour les salariés, ceux qui mettent leurs tripes dans l’aventure et qui ne sont pas là que pour toucher leur chèque en fin de mois. Je crains pour une occasion ratée de plus. Je crains car je ne comprends pas :
Je ne comprends pas et j’espère me tromper.
Je ne comprends pas comment on peut en arriver là. Une Entreprise valorisée 3 M€ en bourse … donc impossible de lever pour elle des capitaux conséquents. Piégées faute d’être cotée en bourse AUSSI. Mais quand comprendrons nous que la bourse elle même pose problème ? Sa liquidité, son manque d’analystes sérieux dans nos secteurs, son image écornée, son peu d’attractivité et de compréhension du public …
Je ne comprends pas comment on peut laisser se déliter une telle situation avec un tel savoir faire et patrimoine. Erreur de management ? Erreur de stratégies ? Conflits d’objectifs ? Lourdeur de “syndicats” ? Savoir faire qui disparait ? Covid, bien sûr et de cela, on a trop tendance à l’oublier.
Je ne comprends pas comment une société qui pose autant question que Cybergun (voir le passé en bourse), valorisée 9 M€ actuellement et qui risque d’avoir beaucoup de mal à trouver de l’argent “frais”, compte tenu du passé, peut parler sérieusement de 20 à 25 M€ d’investissement. Certes sur plusieurs années, certes avec surement des soutiens publics. Même à raconter une belle histoire, car l’histoire peut être belle !
Je ne comprends pas qu’on ne comprenne pas que le savoir faire Français a besoin de COMMANDES, de CLIENTS, de CONFIANCE … et pas de défiance. Verney Carron aurait pu remporter le marché de renouvellement des vieillissants FAMAS de l’armée, mais … soit disant trop cher (ça ne froisse personne) et plus exactement, trop petit pour un marché de cette taille (ça, il était possible d’agir avec de bonnes instructions et même d’avoir une garantie de l’état, de la BPI ou whatever !) … pas assez de lobbying, surement aussi. Le marché du Glock 17 a été mené d’une main de maitre … no comment.
Je ne comprends pas encore et toujours que l’on ne veuille pas voir que la France ne souffre pas d’un problème de CREATION d’Entreprise et ce n’est pas là où il faut aider. Il faut que tous les efforts soient tournés et concentrés au DEVELOPPEMENT des Entreprises. Trop souvent, elles restent trop petites, faute de clients, faute de confiance, faute de marché intérieur (là on commence à se chercher des excuses), faute d’un réseau relationnel suffisant. Trop petit, cela veut dire : pas les moyens de grandir. (financiers, vision moyen / long terme, attirer des talents, premiers vrais clients qui font véritable boule de neige et attirent les suivants …) Et tout se mord la queue.
Je forme le voeux que tout se passe pour le mieux. Je pense même que ce n’est pas Cybergun qui sauve Verney Carron mais Verney Carron qui va sauver Cybergun. J’espère que les dirigeants de Cybergun et de Verney Carron auront le courage de s’assoir sur leurs egos pour imaginer et mettre en oeuvre la meilleure stratégie possible pour leurs Entreprises, leurs collaborateurs et leurs clients. J’espère qu’ils vont se rendre compte (j’ai dit présomptueux) que la stratégie d’atomisation de marques, qui pouvait être intéressante dans le passé avec des sociétés hyper spécialisées n’est plus (je pense) ce qu’il faudrait faire aujourd’hui. Oui à séparer des choses antinomiques (les jouets de Cybergun, la coutellerie, les armes), mais franchement je ne suis pas convaincu par l’idée d’atomiser jusqu’au type d’arme ou même de technologie. Oui à un pôle Français fort, par exemple dans les armes civiles ET militaires … et même de cyber sécurité. Et oui, pourquoi pas. (Verney Carron a investi dans une micro entreprise locale d’ailleurs). Créer l’espace de confiance autour d’une marque coûte aujourd’hui trop de temps, trop d’énergie, trop d’argent. Quand on a un nom d’un certains prestige, il faut l’utiliser, mais au mieux possible.
Bref, je n’y connais rien, donc laissez moi juste espérer (c’est mon coté Américain) et douter (c’est mon coté Français) 😉
PS: allez, quitte à être fou et ne rien y connaitre, j’ajouterais aussi la partie munitions de qualité. Pas pour les chasseurs qui ont tout ce qu’il faut pour pas cher et n’importe où. Non, je parle d’une véritable unité de production: poudre, amorces, étuis … pour l’armée et le civile. L’armée seul pourrait sécuriser un marché et une industrie trop absente de notre territoire et dont on se rend compte depuis de nombreuses années du manque. (nombreuses pénuries)
Unité de production pour le militaire ET le civile, pour l’image et l’utilité. En effet, les tireurs sportifs pourraient être de magnifiques ambassadeurs, à l’échelle mondiale … mais je n’y connais rien et je m’égare. On va laisser faire les spécialistes et … espérer.