Nous avons publié notre chiffre d’affaire hier soir, « après bourse », selon les habitudes. C’est un exercice d’autant plus sensible quand on est coté, que l’on se sait « scruté », attendu, espéré.
Cela crée des attentes et nous n’aimons pas les décevoir, bien sûr. Mais d’un autre côté, cette pression particulière, cette « crainte » de ne pas aller au delà de ce que l’on espère de vous est une course sans fin qui peut pousser à la schizophrénie en ne dirigeant plus sa société « normalement ». Cela peut pousser à faire des choix contraires à l’intérêt de l’Entreprise et nous avons pu, une fois encore, ne pas tomber dans ce piège. Je dis schizophrénie pas par hasard car être côté est un exercice particulier où il faut parvenir à accorder aussi bien le temps court (et la publication au trimestre en est un exemple) et le temps long de l’Entreprise, de l’humain, de la construction durable.
Alors *Oui*, nous sommes, nous aussi, particulièrement déçus.
Déçus de « décevoir » mais surtout déçus que tous les efforts de nos collaborateurs, leurs réussites aussi, car il y en a de nombreuses, ne soient pas plus lisibles dans nos résultats économiques. Déçus aussi bien sûr en tant qu’actionnaire / fondateur / Entrepreneur. Non pas de ce qui a été annoncé et qui sera différent demain, mais déçu par anticipation des remarques difficiles (pour ne pas dire plus) qui ne manqueront pas de fuser inutilement tout à l’heure. Certains ne se rendent pas compte qu’à critiquer durement une société et à raconter parfois n’importe quoi, cela va directement au cœur de ceux qui s’en sentent « responsable ». Je pense à nos collaborateurs qui ont vécu une année particulièrement difficile, comme d’autres me direz vous, mais qui n’ont pas démérité, bien au contraire. Je pense à ceux qui ont été éprouvés humainement, qui ont perdu certains de leurs proches, ceux qui, comme beaucoup d’autres, ont vécu dans l’incertitude et la crainte du lendemain et de ce mal invisible qui nous ronge depuis trop longtemps.
Aussi, je voulais préciser plusieurs points car de nombreux actionnaires sont venus nous rejoindre ces derniers mois. Ils ne nous connaissent peut être pas, au delà de « la ligne » (mot que je déteste presque autant que « boîte » ou « job » ou le fameux « bon courage » que l’on disait mécaniquement hier le matin à un collègue partant travailler…) que nous représentons pour eux et j’aimerais, pour une fois, que nous puissions nous exprimer … en espérant que cela ne « froisse » pas les us et coutumes, le légal et les contraignants des sociétés côtées … j’en prend le risque :
Pour nous, Witbe n’est pas « une ligne », mais une aventure humaine avant tout et un essai de faire les choses différemment. Il y a 21 ans, nous nous sommes pris à rêver de créer une société qui pourrait exécuter à l’échelle internationale dans le domaine des nouvelles technologies et qui viserait à être l’un des leaders de son secteur en offrant des opportunités de premier plan à nos jeunes pour éviter qu’ils ne soient forcés de se délocaliser pour pouvoir travailler sur des sujets majeurs. C’est aujourd’hui chose faite.
Mais tout d’abord quelques mots sur moi pour vous éviter de chercher sur mon blog ou ailleurs.
J’ai 56 ans (j’ai du m’y reprendre à 2 fois pour calculer, j’étais bloqué à 51 ;-)) et 3 enfants. Deux de mes enfants travaillent d’arrache pied au succès de Witbe. Mathieu est maintenant le CEO, après avoir travaillé 8 ans dans l’Entreprise et Arnaud, le directeur marketing. Ils apportent une vision complémentaire et différente de la notre et encore plus « Cloud » et mondiale. Nous avons plus que travaillé la résilience de Witbe … nous sommes maintenant sur deux générations de « Planche » Entrepreneurs ;-). J’y reviendrais car là aussi j’ai entendu tout et son contraire et il n’est pas si courant, dans les Entreprises de technologies de vouloir créer une société qui dure … du moins en France car aux Etats-Unis, c’est monnaie courante et les plus grands groupes de télécoms sont des Entreprises familiales avec des Entrepreneurs à leur tête.
J’habite, depuis plus de 8 ans, pour des raisons professionnelles, aux Etats-Unis, près de notre « factory » à Long Island, à une heure de Manhattan.
Je suis co-fondateur, ex Président de Witbe et avant, co-fondateur et ex Président d’Oléane, (le premier « opérateur Internet ») que nous avons « associé » à France-Télécom en 1998 et où pendant 18 mois ensuite j’ai officié en tant que responsable puis « directeur » de l’Internet Entreprise du groupe.
J’ai été aussi, il y a bien longtemps Président bénévole de la Fing, la Fondation pour l’Internet de Nouvelle Génération, association à but non lucratif. Suivez les, cela vaut la peine.
Je conserve par choix et par « compétence », juste un poste fonctionnel chez Witbe, volontairement non opérationnel.
Avec mon associée et épouse, Marie-Véronique Lacaze, actuelle Président(e) de Witbe, nous avons investi un peu plus de 7 millions d’euros dans le groupe, principalement à sa création, ce qui fait de nous le premier actionnaire de la société. Donc « légèrement » concernés par le cours de bourse … nous sommes quelque part dans le même bateau.
Mais chose importante à dire, je pense: nous n’avons jamais revendu une action de la société, ni au moment de l’IPO, comme cela se fait généralement, ni après, ni même pendant que l’action était au plus haut ces mois derniers. Nous ne l’avons pas fait car nous voulons rester pour le moment l’actionnaire majoritaire de référence et incarner une certaine stabilité, une force, une confiance. Nous ne l’avons pas fait non plus car nous considérons que nous ne sommes pas à une valorisation suffisante pour perdre le bénéfice de cette majorité de contrôle ou perdre quelques dizaines de % qui pourraient valoir bien plus cher plus tard. Nous ne l’avons pas fait malgré les nombreuses sollicitations d’acteurs financiers de premiers plans ces derniers mois.
Ceci étant dit et au risque de vous surprendre je vous dirais que Witbe n’a jamais été aussi « fort », de ce que j’en perçois en toute objectivité, en n’étant pas « la tête dans le guidon ».
Factuellement, Witbe est à un niveau « industriel » et même économique de 2 à 4 fois plus important qu’au moment de son IPO. Et je vais encore entendre … Witbe ça ne « vaut pas » … alors qu’à l’IPO, la valorisation s’est accordée entre les banques et nous, les principaux actionnaires, à partir de la méthode des DCF principalement, (qui ne prend pas en compte les assets immatériels), sur laquelle on applique encore un discount. Comment « valoir » moins en « valant » plus ?
– Witbe c’est 155 personnes, 155 talents, 155 familles, plus de 25 nationalités différentes, une exécution dans plus de 30 pays, des bureaux à Nanterre, Londres, Montreal, New York, Massapequa (Long Island, NY), Denver (CO), San Jose (CA), mais aussi des présences locales dans une dizaine d’autres pays, pour suivre les besoins de nos clients.
– Witbe c’est une gamme de produits de classe mondiale, entièrement conçus par ses propres équipes de R&D, sans sous-traitance dans des pays low cost (avec la qualité du code et les difficultés de maintenance qui vont avec).
– Les technologies de Witbe sont utilisées, au quotidien, par des Entreprises dont il y a quelques années je ne faisais que rêver de pouvoir approcher. Vous en retrouverez de nombreuses au sein de services que vous utilisez quotidiennement ou au générique des principaux films / séries que vous regardez 😉
– Witbe, à cause ou peut être grâce à cette crise, s’est entièrement ré-inventée. Il a fallu apprendre à travailler encore mieux à distance les uns des autres. Il a fallu imaginer de nouveaux process. Informatiser de nombreuses choses que nous n’avions pas eu le temps de nous occuper ou qu’il fallait faire différemment. Il a fallu à Paris nous reconfigurer entièrement et physiquement aussi.
Est-ce que cela sera suffisant ? Non bien sur car dans ce domaine il faut être prêt à remettre tous les jours l’ouvrage sur le métier. Et là aussi c’est une grande force de Witbe: la résilience. Rien n’a jamais été facile. En 21 ans, nous avons traversé un nombre de crises (2000, 2001, 2003 … et toutes les suivantes) incroyables et nous en sommes toujours sortis renforcés.
Sauf qu’ici, nous ne sommes pas en crise. C’est le monde qui l’est. Nous serions en crise si nous avions perdu notre foi et notre motivation. Si nous avions de mauvais produits, des collaborateurs insuffisants. Si nous avions perdu la confiance de nos clients. Pire, si nous ne savions pas où aller et si nous n’avions plus de « vision juste », comme on le disait à la Fing. Nous serions en crise si nous avions préféré le temps court au temps long, le coup financier au capital patient, la communication et les gesticulations aux vrais assets matériels et immatériels et à la protection de notre vaisseau amiral : Witbe.
Cette crise, nous avons décidé de l’aborder comme nous l’avons toujours fait, en tant qu’Entrepreneur et non comme de « simples » gestionnaires qui regardent le monde au travers de leur fenêtre Excel. Ceci dit sans animosité aucune.
Il nous aurait été possible de décider des coupes sombres, de maximaliser des revenus non pereins (de service par exemple, ou de vente à perte de produits sans rien assurer derrière) et de transformer la société en futur Zombie. Au contraire, nous avons fait le choix de la confiance raisonnée. Confiance dans notre marché. Confiance dans la reprise. Confiance en ce que nous avons bâti, en nos collaborateurs, en notre force collective, jamais mise à terre, en 21 années de crises continues. Et enfin, la confiance de nos clients, qui ne doit jamais être atteinte. Nous sommes là pour et grâce à eux. Merci ! Nous avons travaillé trop dur pour la perdre maintenant en faisant n’importe quoi.
Je ne peux pas vous donner ici la liste des clients qui nous ont fait confiance en 2020, mais je peux vous dire que c’est véritablement impressionnant. Et ce n’est pas fini ! Certains le savent car nous pouvons parfois mentionner des noms, sans les écrire.
2021 s’engage « pas si mal » compte tenu du marasme à l’échelle mondiale. Nous avons de nombreux projets avec des clients actuels ou futurs. Notre carnet de commande, poussé par des activités qui n’ont pas pu avoir lieu en 2020 se remplit et notre horizon est bien occupé …
Notre stratégie « Cloud » était bien vue car elle est maintenant particulièrement nécessaire dans un contexte où le travail à distance va s’ancrer durablement dans notre paysage. Bien anticipé, même si cela réduit ponctuellement notre chiffre d’affaire, cela sécurise beaucoup d’autres choses …
Mais je pense aussi à toutes les victimes du Covid. La réalité n’est pas celle que nous lisons dans le bilan de quelques sociétés qui « profitent de la crise », comme j’ai pu le lire. La réalité c’est Manhattan quasiment désert. Londres sous confinement permanent. Ce sont des immeubles, sièges d’importantes sociétés, de milliers de m2 et de parking vide. Ce sont des gens qui ont la peur au ventre et même pour certains, qui n’ont pas de quoi manger. Ce sont des malades ou des personnes agées seuls, qui souffrent. Des familles dysloquées. Ce sont des morts … en un an aux Etats-Unis, le Covid a tué plus que ce que la guerre du Vietnam n’a tué de soldats Américains. J’ai l’impression parfois que nous sûr-pondérons quelques sujets mineurs (les apéros par exemple) et ne voyons plus l’essentiel. Le Covid ce sont des emplois disparus et des sociétés qui ne s’en relèveront, sans doute, pas. Le Covid ce sont de nombreux sites web qui fonctionnent de moins en moins bien car on a oublié que le numérique, c’est avant tout de la compétence, donc de l’humain. Le Covid enfin c’est le risque d’une société divisée qui sera notre perte à tous. Quant on monte « la jeunesse utile » contre « les vieux sacrifiables », que l’on oppose « Des Dieux et des inutiles », c’est que toutes les limites sont franchies. On pérore sur la Liberté, on ne voit déjà plus la Fraternité, l’humanité. Mais on en reparlera dans un autre post … ca n’est pas le moment.
Je suis trop long, j’en suis désolé et je finirais juste en disant, comme une personne le faisait remarquer justement dans un forum :Witbe, tout n’est pas mauvais, LOIN DE LA 😉 et #GoWitbe … <3 nos ptits gars et filles … 😉 … sorry my Witbe’s English fellow, I prefer not to try to translate. Ask someone behind you, I’m pretty sure a French guy (or girl) is not far ;-))) <3 too